Nous avions gribouillé quelques lignes sur nos aventures en pays Mongol dans nos carnets de route. Après nos retrouvailles avec Flo et Alex en Chine, il semblerait qu’elles méritent d’être partagées.. 😉 Voici donc le récit de nos aventures.

Nous quittons Oulan Bator pour le nord de la Mongolie en prenant un bus de nuit. Direction le lac de Khövsgöl. C’est près de ce grand lac, petit frère du lac Baïkal en Russie, que nous attend notre prochain Workaway.. (Pour ceux qui ne connaissent pas ce site, il s’agit de Woofing, on apporte son aide à un projet et en contrepartie on est logé et nourrit). Nous devons aider une famille de nomades pendant deux semaines, enfin ça c’est le plan initial..

Sur le trajet de nuit, qui dure 14h.. notre chauffeur, si on peut appeler ça un chauffeur, nous fera de belles frayeurs.. Nous arriverons finalement à destination…bien fatiguées, mais entières.

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Arrivée à Katghal : Nous ne sommes finalement pas accueillies par notre hôte, celui qui gère les Workaway, mais par un autre volontaire. Aucun souci, Michael est cool et il nous dit que le  «boss» n’est pas là mais que lui nous introduira le lendemain chez les nomades.. cool, on a hâte de découvrir notre futur chez nous pour les deux semaines à venir.

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Le lendemain matin, il pleut…. de ces pluies fines qui vous glace jusqu’à l’os..
Michael nous accompagne en taxi brousse jusqu’à la «ferme» nomade. Il nous explique qu’on va aider une femme, nommée Hot qui vit seule mais qui est «so friendly». Sur le chemin on a le nez collé à la vitre et découvrons avec bonheur la vallée où vit Hot. Nous admirons les yourtes disséminées et les nombreux troupeaux de yacks, moutons, biquettes.. que c’est beau et tranquille! A part quelques panneaux solaires sur les yourtes.. on est bien dans la vie nomade! Hot, elle habite une petite cabane en bois.

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Comme Hot est en train de faire la traite avec ses voisins au moment ou nous arrivons, les présentations sont vites faites.. La pluie, qui sera de la partie toute la journée, nous oblige à nous abriter. Michael nous fait entrer dans la cabane. Ce qui nous frappe en premier.. eh bien, cette odeur de lait, de gras, de mouton et de fumée.. humm ça sent fort, très fort . La cabane, c’est simple, c’est un rectangle d’une vingtaine de mètre carré avec un poêle à bois au milieu. On comprend vite pourquoi ça sent si fort.. Il y a trois lits dans la cabane, celui de Hot quand on entre à gauche et deux autres lits au fond de chaque côté. Sur l’un, il y a un espèce de fromage à sécher et sur l’autre de la viande. Mais attention pas dans un plat ou sur un papier.. non non non, elle sèche directement sur la couverture..

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On se regarde morte de rire.. dommage que le temps soit si mauvais.. la on a qu’une envie, c’est de planter notre tente. Le reste de la cabane est composé de mobilier peint qui accueille tout un tas de fourbi. Du bois attend patiemment dans un coin a côté des bidons de lait.
Le chauffeur du «taxi» nous «allume un feu», qui, à peine a t-il fermé la porte derrière lui, s’éteint. On essaye pendant plusieurs minutes de le rallumer, on sacrifie même quelques pages de Sudoku.. sans succès, l’humidité est partout. Tant pis, nous sortons pour voir si on a besoin de nous. Coco se retrouve à transporter du bois, et moi je nettoie l’enclos des biquettes. Alors en temps normal quand il fait beau, ce n’est pas la tâche la plus sympa du monde. Mais quand il pleut, que tu n’as pour nettoyer qu’un espèce de râteau chelou, 2 couvercles de boîtes de conserves en guise de pelle et une vieille bassine en alu comme brouette.. hum ça devient vite très amusant. Enfin pour celui qui regarde ! En 2 minutes, je me retrouve couverte de merde. La corde avec laquelle je dois tirer la bassine pour la vider au milieu de la steppe, macère tranquillement dans le joli jus marron formé par la pluie, malgré mes nombreuses tentatives pour qu’il reste propre. Bref, je capitule et décide de la jouer à la nomade avec l’aide de la belle fille de Hot (enfin ça, on en est toujours pas sures.., difficile de savoir qui est qui vu le nombre de personnes qui défilent dans une journée) et sous le regard plus qu’amusé de Coco..
On termine de nettoyer le terrain devant la cabane, puis Hot nous fait signe de rentrer. Après cet épisode, nous sommes contentes de nous mettre au chaud.. bah oui parce que Hot, elle, a réussi à allumer le feu en 2 minutes..

Elle commence à faire chauffer le lait qu’elle vient de traire. Mais moi en attendant.. eh bien mes mains sont toujours couvertes de merde.. et autant vous dire que chez mes nomades, le robinet ou tu as juste à tourner pour avoir de l’eau, tu l’oublies, et le savon encore plus. Bref après m’être «rincé» les mains, on fait plus ample connaissance avec notre hôte. Bien sur, c’est à grands coups de gestes et de dessins, car notre hôte ne connaît que 5 mots d’anglais. Nous passerons ensuite l’après-midi à préparer le repas du soir : des beignets de mouton. A part le découpage de la «viande» qui se trouve en fait être du gras, des boyaux et de la peau, on passe un après-midi agréable en compagnie de Hot et de ses petits enfants qui sont arrivés ici comme des grands en traversant la vallée tout seuls (ils ont 2 et 4 ans). Le petit garçon est malade.. et vu les produits laitiers qu’ils mangent, on se dit que son système digestif ne doit pas être ravi. On a la preuve un peu plus tard, quand Hot lui enlève son pantalon pour le changer.. le petit a la diarrhée.. Pendant qu’on rigole avec eux, Hot se donne pour mission de nettoyer ce fameux pantalon. Elle ne trouvera rien de mieux que de gratter les selles avec le couteau qui se trouve sur la table.. «Euh Hot, est ce que c’est le couteau qui vient de te servir à nous couper une tranche de pain ??». Hum.. il en aura eu des utilisations ce couteau pendant notre séjour. On a aussi pu voir Hot s’en servir pour se gratter le dos.. autant vous dire que les prochains jours..on a sorti nos opinels..

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On a eu notre lots d’histoires de caca pour la journée..  Enfin presque car évidemment, il faut apparemment participer à toutes les tâches. Hot tend les papiers plein de merde à Coline pour aller les emmener dans les toilettes situées au milieu de la steppe. Au moins, ça fera une odeur de moins dans la cabane. Nous comprendrons aussi un peu plus tard que les toilettes étaient bien trop loin pour elle, car sans gêne, elle faisait pipi à quelques mètres de la cabane, quand ce n’était pas devant la porte. On la remercie, elle s’éloignait quand même un peu plus pour la grosse commission.

Dès son retour, Hot demande également à Coco de lui passer la viande qui se trouve sur le lit qui est supposé être le mien pour les prochains jours. Ouf.. je n’aurai pas à partager. Puis Hot, découpe les morceaux pour que Coco puisse les suspendre à de vieux clous rouillés sur les poutres transversales.. Morceaux de viande que nous nous prenions continuellement dans la tête dès qu’on se déplaçait dans la cabane!

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La journée se poursuit par la traite des Yacks, dont Coco se chargera seule avec Hot pendant que je raccompagne les enfants à l’autre bout de la vallée. Nous terminons cette longue journée par un peu de vaisselle. Il est 22h quand nous nous couchons enfin, mais pas à l’horizontal.. les lits sont tellement défoncés, qu’on a presque les genoux dans le nez. Un rapide fou rire et nous nous endormons. Le lendemain le réveil est prévu à 7h.

La nuit..fut mouvementée.. entre les courants d’air dans le nez, le yack qui broute à 30cm de la cloison et que tu entends mastiquer, ou encore les énormes pets de Hot.

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A 7h, nous voilà au milieu de la vallée pour aller chercher les yacks mama (1 des 5 mots anglais de Hot). Il faut savoir que Hot n’est pas la seule à avoir des yacks dans la vallée, à vrai dire, il n’y a que ça..  on est mal barrées ! Heureusement Coco ayant fait la traite la veille, avait rapidement repéré qu’elles avaient des colliers. On voit un groupe un peu plus loin, alors on file vérifier.. Il n’y en a que quelques uns, ils ont des colliers mais coco est certaine que ce ne sont pas les nôtres… ok, on va bien s’amuser..
En plus de ça, leurs longs poils cachent les éventuels pis. Bref on décide rapidement de tous les ramener.. Hot n’aura plus qu’a faire le tri. Mais ils ne se laisse pas faire si aisément.. pas facile de les faire décoller le nez de leur herbe.. ça nous prend un temps fou. Et quand on revient, il en manque toujours.. mais ou sont elles ?! Hot demande à Coco de rester pour l’aider avec les bébés yacks, et me demande de chercher le reste du troupeau, dont les jeunes yacks. Super, je sais même pas à quoi ils ressemblent et pour ceux qui ne me connaissent pas, il faut savoir que les vaches ou ce qui y ressemble.. ce n’est pas l’animal avec lequel je me sens le plus à l’aise. En choisissant ce workaway, je me mettais un petit défi !
Bref, me voila reparti dans la vallée, avec pour seules consignes les hurlements de Hot. Ah oui j’ai oublié de préciser.. Hot ne parle pas, elle hurle, ce qui fait que tu as l’impression de te faire engueuler tout le temps. Finalement je ramène plus de yacks que nécessaire, mais il y a l’air d’avoir le compte. Coco pendant ce temps la, a fait toute la traite.. et rien qu’a voir sa tête, ça n’a pas l’air fun. Il faut retirer le petit de sa mère juste après qu’il ai tiré quelques secondes le lait. Mais ce sont déjà de beaux morceaux.. et ils ne se laissent pas faire. Et Hot, plutôt que de nous montrer, nous laisse galérer. Coco sort de l’enclos avec une chaussure déchirée et des bleus causés par les coups de cornes. Pfffiou, et il est encore tôt.. la journée s’annonce encore chargée. La suite de la matinée sera réservée à aller chercher l’eau à la rivière, aider Hot à transformer le lait du matin en yaourt ou encore à « washer » (un autre des 5 mots d’anglais de Hot, mais son préféré !!). Vaisselle, ustensiles, sol, tout y passe, on se croirait au printemps. L’état du sol est juste..immonde ! Tout le monde rentre dans la cabane avec des chaussures pleine de merde et Hot préfère tout jeter par terre plutôt que dans le sceau (gras, cendres, papier, nourritures).. Puis de temps en temps, elle nous demande de balayer.
Ah oui, Hot fait au moins 150kg, mais surtout quand il est question de prendre un truc, elle préfère nous hurler les instructions en mongol pendant 10mins plutôt que de se bouger les fesses.. Rigolo au départ, ça devient vite lassant surtout quand tu es debout depuis 7h du mat. Tasse, biscuit, portable, tout y passe, elle ne se lève que rarement. C’est vrai que 20m² c’est un peu grand. Des invités arrivent et il faut encore qu’on leur serve le thé. On a pas encore fait de pause et commençons à être un peu agacées, sachant que nos repas se résument à du beurre de yack sur du pain sec et du thé au lait de yack et ça 2 fois par jour.  Mais on garde notre bonne humeur et on bosse pour lui montrer qu’on est pas des feignasses. On sait maintenant que la vie nomade est difficile.

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Ce soir la, Hot nous demande d’aller chercher les bébés yacks et les mamans dans la vallée. Il est 21h, le soleil commence à se coucher. On est dorénavant plus à l’aise pour les reconnaître et la manœuvre est assez vite bouclée. On est sur le point d’arriver a l’enclos quand on réalise qu’ils ne sont que 6.. Eh merde il en manque un.. et la 7ème mère est en fait un mâle. Il faut qu’on retourne chercher le dernier. Il commence à faire vraiment sombre mais on file checker les environs. Pas de bébé yack à l’horizon, en même temps la vallée est grande et il fait vraiment trop sombre.. on fait le tour mais rien.. Bon bah retour à la cabane.. Hot nous attend et elle s’aperçoit vite qu’on a pas le dernier.. Elle nous fait de grands gestes et nous fait comprendre qu’il faut qu’on aille le chercher. Ok c’est reparti, mais dans la pénombre cette fois ci. On tourne sans succès et manquons de nombreuses fois de chuter en glissant sur des bouses bien fraîches.. toujours rien.. et il fait vraiment trop nuit, on ne distingue plus rien. Les yacks que l’on croise doivent se demander ce qu’on fou là à tourner depuis 30mins. Retour auprès de Hot. Cette fois ci, le ton monte rapidement car on ne voit rien mais elle nous demande encore d’y retourner en nous indiquant la direction.. On ne bouge pas.. ras le bol.. elle hurle littéralement..et finit par céder en ouvrant la marche pour aller les chercher. On a pas fait 50m que Hot attrape un bâton par terre. Avec coco on se moque un peu en pensant qu’elle s’en servirait de canne.. mais non Hot nous cri «dogs». Nan mais on hallucine.. «Eh Hot, ça fait 3 fois qu’on fait le tour..et c’est maintenant que tu nous le dis..».
Bref on finit par arriver devant un ravin, Hot se stop net et nous montre du doigt l’autre côté.. ça on s’en serait pas doutées.. à nous de jouer ! On descend. C’est bien casse gueule et on voit rien. On est à un point, ou on se met a rire tellement on n’en peu​t plus. Une fois de l’autre côté, on marche un peu et en effet le bébé yack et sa mère sont bien là.

Tous les bébés yacks sont dans l’enclos.. on peut enfin enfiler nos pyjamas et se mettre au lit, il est 22h15. Hot arrive après nous dans la cabane et nous sort «wash wash» en pointant du doigt la vaisselle. Vous aurez deviné, sa vaisselle, elle l’a faîte toute seule.

Bizarrement, on a bien dormi cette nuit là ! Pour la petite anecdote : excepté dans la nuit quand Hot s’est mise à pisser dans le sceau qu’on utilise pour les déchets organiques et que la puissance du jet nous a réveillé, ça en plus des pets sonores qui ponctuaient nos nuits.

Jour 3 : levé 6h50.. ça pique ce matin…
Mais comme on a pas trop assuré la nuit dernière, on est bien décidées à se rattraper. Une journée encore bien chargée. Même programme que la veille, mais cette fois en fin de matinée, j’aide Hot a couper le bois à la scie à mains pendant que Coco touille le lait.

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Ah oui, ce que j’ai oublié de préciser, c’est que de nombreuses fois par jour nous sommes obligées de faire fuir les biquettes et les yacks qui entrent dans le jardin de Hot.. On est aussi chargé de faire peur aux oiseaux qui picorent le yaourt qui sèche à l’extérieur. Ce fameux yaourt dur et acide que Hot vend de temps en temps. « Hot, tu leur a expliqué à tes clients qu’il faut qu’ils enlèvent les crottes d’oiseaux avant de les manger ? ».

Clairement, à 13h00, on est juste épuisées. On a bien envie d’aller se laver aussi..ça fait 4 jours. On explique à Hot qu’on veut une pause. La première en 3 jours, on s’est dit que ce n’était pas trop demandé. En lui expliquant qu’on sera bien évidemment de retour pour la traite à 16h.

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Mais la encore, ça ne lui va pas.. sauf que cette fois on lui demande pas son avis et on s’en va. La pause finalement sera de courte durée. Alors que l’on est posées au bord de la rivière, Michael, vient à notre rencontre. Hot lui a demandé de ramener les yacks.. Bizarre, ils rentrent toujours tous seuls.. à croire qu’il lui fallait un autre esclave. Bref.. Le truc c’est que Michael ne connaît pas le troupeau.. donc on part chercher tous les 3 nos yacks. On monte, on descend, on marche, on monte, on marche, mais ce ne sont jamais les bons. On finit pas capituler et on rentre bredouille.

Michael en profite pour filer car il a encore 8kms pour rentrer. Mais quand on arrive, Hot n’est pas la.. bizarre. Les voisines finissent par se pointer et on comprend que ce sont elles qui font la traite ce soir. Le troupeau finit par arriver.. bah ouais ils finissent toujours par rentrer et ce sera la traite la plus cool de tout les temps.. les filles nous montrent même comment faire des nœuds rapides.. si on avait su ça avant.. on se serait évité un bon nombre de coups de cornes. On rigole bien, tout est détendu, personne pour crier. La vie nomade c’est plutôt sympa en fait, mais pas avec Hot..

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Quand Hot rentre un peu plus tard et nous crie «wash wash» à peine passé la porte, on ne met pas longtemps à se dire que ça va pas le faire. On lui demande de composer le numéro du «boss» et on explique à Bayra que l’on veut partir. Il n’a pas l’air vraiment surpris et viendra nous chercher le lendemain matin.

On vous fait pas de dessin, pas contente de perdre ses deux esclaves, elle profitera jusqu’au bout de notre gentillesse pour être infecte et continuellement en demande. Le dernier jour, elle nous fera même lever à 6h30 pour être certaine qu’on ai le temps de bosser..

Nous repartirons en moto, un peu à regret car on se sentait bien dans cette vallée, nous avons fait de belles rencontres dans le voisinage. Mais Hot, elle, ne va pas nous manquer!! 3 jours et demi, c’était bien assez.

PS : On ne vous a pas raconté tous les détails..
PS 2 : Après 3 mois et une dizaine de machines… nos affaires sentent encore le yack !

Petite vidéo à l’appui … :